Page:Gérard - L’Ancienne Alsace à table, 1877.djvu/211

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quelques-uns le faisaient précéder d’une légère collation vers midi ; c’était le prandium. Plus tard, sous l’empire, quand tous les excès infectèrent les mœurs, l’on intercala trois nouveaux repas dans les anciens : le jentaculum, de bon matin ; la merenda, entre le prandium et la cœna, et la comessatio, le soir, sur le tard. Le voyageur grec Posidonius, qui a décrit les festins gaulois, ne nous a pas renseignés sur l’heure habituelle de leurs repas ; je n’en dirai donc rien, non plus que des usages mérovingiens et de ceux du moyen âge. J’arrive tout de suite aux temps modernes de la France. Louis XII dînait à huit heures du matin et soupait à trois heures ; il est vrai qu’il se couchait à six. Après son troisième mariage, avec Marie d’Angleterre, il fixa, pour plaire à sa femme, son dîner à midi et ne se coucha qu’à minuit, métier auquel le bon roi ne dura que six semaines. Ce changement ne fut pas goûté par la cour. Sous François Ier, le dîner fut rétabli à neuf heures du matin et le souper à cinq heures, d’où vint ce dicton :


Lever à cinq, dîner à neuf,
Souper à cinq, coucher à neuf,
Font vivre d’ans nonante-neuf.


Henri IV, Louis XIII et Louis XIV dînaient à onze heures, Louis XV à deux heures et Louis XVI à cinq heures. — Au dix-huitième siècle, l’on dînait à un heure dans presque toutes les hôtelleries de Paris ; mais le bourgeois mangeait à deux heures, le marchand à trois, et la noblesse à quatre ou cinq heures.

En Allemagne, les variations des heures de repas étaient telles qu’on peut affirmer qu’à toute heure du jour une partie de la population du Saint-Empire était occupée à dîner. Au dix-septième siècle, les chanoines de Tubingue et les comtes d’Erbach dînaient à neuf heures du matin, les princes de Gotha à dix heures, la cour de Bavière à onze heures, celle de Vienne à midi, d’autres, et c’était le plus grand nombre, à une heure et à deux ; sous Frédéric le Grand la classe distinguée de Berlin dînait aussi à deux