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Page:Gérard - La chasse au lion, 1864.djvu/235

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primé par des mouvements vifs et saccadés ; enfin, lorsqu’elle avait pu voir l’animal, je le vis comme elle.

Il monta lentement l’escarpement du ravin et s’arrêta sur le bord de la clairière à douze pas de moi.

Il se présentait tout à fait de face, et son large front était un beau point de mire. Deux fois ma carabine, s’abaissa, deux fois je l’ajustai entre les deux yeux, deux fois mon doigt pressa doucement la détente : mais le coup ne partit point, et j’en ressentis de la joie.

Il y avait deux ans que je n’avais rencontré de lion si grand, si beau, si majestueux, et je l’aurais tué avant d’avoir pu l’examiner à mon aise !

Qu’est-ce qu’un lion mort ? Qu’est-ce qu’une belle femme dans un cercueil ; La beauté moins la vie, c’est-à-dire la laideur.

Et puis, s’il est vrai que vivre c’est sentir, où et quand trouverais-je des émotions pareilles, si ce n’est dans un pareil tête-à-tête, dans un pareil lieu, à une pareille heure ?

Le noble animal, comme s’il avait compris ma pensée, s’était couché, et, après avoir croisé ses énormes pattes, il avait doucement appuyé sa tête sur elle comme sur un oreiller.

Sans prêter la moindre attention à la chè-