Page:Gérin-Lajoie - Dix ans au Canada, de 1840 à 1850, 1888.djvu/488

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du bill à laquelle on veut nous faire applaudir, qui est de nature à exciter le moindrement notre admiration? Ce paragraphe pourtant, si nous allions le voter, nous surprendrait, nous arracherait à notre insu une approbation formelle d'un acte qui a si justement été regardé comme odieux, qui a été répudié comme tel par tout le pays. À l'époque où dans cette Chambre on a protesté contre l'acte d'Union, on doit l'avoir fait avec sincérité! Pourquoi donc, maintenant que j'y suis, sans qu'il y ait eu de mon choix, que je n'y suis rentré qu'après avoir franchement déclaré à ceux qui voulaient m'y envoyer, que je préférais ne pas y aller et que je désirais vivre à l'écart, qu'après avoir donné ouvertement les raisons pour lesquelles je ne voulais pas rentrer de nouveau dans la vie publique; pourquoi donc, quand je dis que l'acte d'Union et injuste et que je protesterai toujours contre cet acte, pourquoi cette clameur si grande qui s'élève contre moi?

Ai-je fait autre chose que répéter ce qu'avaient dit avant moi tous ceux qui dans cette Chambre m'en font un crime aujourd'hui? Dans quels termes ne s'était-on pas récrié contre cet acte? A-t-on jamais trouvé d'expression trop forte pour le qualifier? De quelles expressions s'est-on servi quand on en a appelé au peuple du pays, quand on a voulu lui faire signer des requêtes contre cet acte odieux? Le manifeste du comité constitutionnel de Québec n'avait-il pas dit:

« Aucune considération quelconque ne devra nous induire à voter pour aucun candidat qui ne désapprouve pas l'Union et ses iniques dispositions; car en votant pour un tel candidat, nous consentirions à l'acte, nous approuverions ceux qui l'ont conseillé. Nous proclamerions notre propre DÉSHONNEUR, et nous déshonorerions notre propre pays, en tendant le cou au joug. »

Voilà ce que disait le manifeste de Québec, et ce que tout le district de Québec a approuvé. Aurait-on pu alors prévoir que ceux mêmes qui étaient à la tête du mouvement, qui signaient ce manifeste, viendraient plus tard applaudir à cette Union qu'ils stigmatisaient comme infâme? Aurait-on pu prévoir qu'ils seraient