Page:Gérin-Lajoie - Dix ans au Canada, de 1840 à 1850, 1888.djvu/513

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sans exemple, émettant, comme on l'a fait, des débentures en si petites valeurs, en montants aussi modiques que cinq et dix piastres. La Chambre d'assemblée ne peut pas donner son approbation à une semblable mesure; elle n'a pas pu le vouloir. Pourquoi le ministère, s'il voulait rétablir notre crédit, n'a-t-il pas fait à cet effet les propositions à New York, dans Wall Street, à la bourse de France ou aux marchands de Hollande? Ce sont là de grands centres de circulation, où les fonds étrangers sont négociés en tout temps. Si les membres du ministère avaient eu foi dans le crédit public, ils auraient donc contracté, ainsi qu'ils en avaient le pouvoir, avec ces nations étrangères. Mais quand on est autorisé à emprunter de l'argent à six pour cent et qu'on ne le fait pas; qu'au lieu de le faire, un gouvernement descend jusqu'à émettre des débentures d'une valeur si petite qu'elles ne peuvent manquer d'avoir le sort des assignats, c'est déclarer à la face du monde qu'on n'a plus de foi dans le rétablissement du pays, c'est porter au crédit son coup de mort. Tout cela est une suite de la position que nous a faite l'acte d'Union. Je crois donc que plus tôt viendra la séparation des deux provinces, mieux ce sera pour les deux partis. Le rappel de l'Union est surtout désirable pour le Bas-Canada. Cette union nous met, vis-à-vis du Haut-Canada, dans la même position qu'est Irlande vis-à-vis de l'Angleterre. C'est la partie de toute l'Europe où il meurt actuellement, de faim, le plus grand nombre d'hommes. C'est la domination d'un pays sur un autre qui produit de pareils résultats. Tant que nous serons soumis, comme nous le sommes, à la domination du Haut-Canada, nous ne pourrons rien espérer de mieux. On doit donc s'empresser de faire cesser un pareil état de choses. Jusqu'à présent, l'attention publique s'est abandonnée surtout à la réforme électorale: cela, non pas parce que c'est la seule réforme désirable, mais parce qu'elle est un moyen de conduire au rappel de l'Union. Tous les hommes de bon sens sentent que cette mesure est désirable, sentent la difficulté qu'il y a de législater pour les deux pays si différents en tous