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JEAN RIVARD

parlant ainsi des obstacles que je rencontre, je prétende jeter du blâme sur les habitants de nos campagnes ; non, je ne fais que constater un état de choses dû à des circonstances incontrôlables, et dont il est facile de se rendre compte.

« Si d’un côté j’accuse les individus, il me serait facile d’un autre côté de disculper ou justifier complètement le gros de la population.

« Si nous ne possédons pas encore cet esprit public, cet esprit de gouvernement si désirables dans tous les pays libres, cela n’est pas dû à un défaut de bon sens ou d’intelligence naturelle chez la classe agricole, car aucune classe ne lui est supérieure sous ce rapport, mais on doit l’attribuer à deux causes principales dont je vais dire un mot. Convenons d’abord qu’il faut un apprentissage en cela comme en tout le reste. La science du gouvernement ne s’acquiert pas comme par magie ; elle doit s’introduire par degrés dans les habitudes de la population. Or, nos pères venus de France aux dix-septième et dix-huitième siècles n’ont pas apporté avec eux la pratique ou la connaissance de ce que les Anglais appellent la self-government ; et ce n’est pas avec l’ancien régime du Bas-Canada, sous la domination anglaise, que leurs descendants auraient pu en faire l’apprentissage. À peine quelques années se sont-elle écoulées depuis que nous avons été appelés à gérer nos affaires locales ou municipales. Rien donc de surprenant que nous soyons encore novices à cet égard, et que nous ne marchions pour ainsi dire qu’en trébuchant. Le progrès se fera insensiblement ; nos lois administratives sont encore loin d’être parfaites ; elles s’amélioreront avec le temps et finiront