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JEAN RIVARD

dustrie, d’ordre et d’économie. Elle avait été élevée par une mère de talent, et surtout de jugement, qui avait compris que l’un de ses principaux devoirs était d’initier de bonne heure sa fille à tout ce qui concerne les soins domestiques. Aussi était-elle, quoique n’ayant pas encore vingt ans, parfaitement au fait de tous les devoirs d’une maîtresse de maison. Elle pouvait présider à la cuisine et au besoin s’occuper des moindres détails de la basse-cour. Elle pouvait en outre coudre et tailler elle-même tout son linge de corps et de ménage, et confectionner sans le secours de personne ses divers effets de toilette. Aucune affaire d’intérieur ne lui était étrangère.

Pour le père Routier et surtout pour Madame Routier, le mariage de Louise et son départ de la maison étaient loin d’être considérés comme un avantage ; c’était au contraire un sacrifice de plus d’un genre. Louise n’appartenait pas à cette classe de la société où la jeune fille douée d’intelligence, de force et de santé est cependant regardée comme une cause de dépenses plutôt que comme une source de richesse, où (chose pénible à dire !) elle est en quelque sorte comme un fardeau dans la maison de son père ! Erreur impardonnable dans l’éducation de la famille, qui laisse incultes et sans utilité des facultés que Dieu donne à toutes ses créatures pour les développer, les perfectionner et les faire servir au bonheur général.

Si l’on songe maintenant à toutes les autres qualités de Mademoiselle Routier, à sa gaîté, à l’amabilité de son caractère, à sa sensibilité, et pardessus tout, à sa nature aimante et dévouée, on admettra que Jean Rivard avait été aussi heureux dans le choix de sa femme que dans tout le reste.