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TRAGI-COMÉDIE.

AGRIPINE.
Ha, madame, il est vrai !que pûtes-vous donc faire,
Et comment le quitter, pour épouser son frère ?
HERCINIE.
J’écoutai le devoir, j’écoutai la raison ;
J’appris en même jour, sa double trahison ;
Je su qu’en me trompant, il m’avait outragée ;
Je su que sa parole, était trop engagée ;
Qu’une autre avait la foi, qu’il me voulait donner,
Et qu’il ne me suivait, que pour l’abandonner.
Lors un juste dépit, s’empara de mon âme,
Le feu de la colère, en chassa l’autre flamme :
Et l’invincible Héros qui causait mon effroi,
Me fit ressouvenir qu’il avait eu ma foi.
Et puis grande Princesse, une fille enlevée,
Ne peut que par l’hymen voir sa gloire sauvée :
Ainsi pour la sauver, j’acceptai cet Époux,
Le plus grand des mortels, hors l’Empereur et Vous.
Mais il eut à l’instant des nouvelles certaines,
Du merveilleux progrès de vos armes hautaines,
Il sut que vers l’Albis, plus d’un Palais brûlait,
Et qu’au deçà du Rhin, plus d’une Aigle volait.
Lors, quoique ce grand cœur eut de l’idolâtrie,
Il voulut me quitter, plutôt que sa Patrie ;