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ARMINIUS,
Et songe que je suis fille d’Inguiomere ;
Songe que Segimire, est sans félicité ;
Songe que Flavian est sans fidélité ;
Et qu’ainsi dans l’excès de mes cruelles peines,
Un trépas désiré, vaudrait mieux que mes chaînes ;
Si bien qu’en l’attendant, comme un dernier secours,
Dans un sort plus obscur, laisse couler mes jours.
Tu sais que cet ingrat m’est toujours plus contraire ;
Tu sais qu’il m’abandonne, et qu’il trahit son frère ;
Tu sais qu’il a repris l’objet de ses désirs ;
Et tu veux que je vive, après ces déplaisirs !
Ha, je ne le saurais ! Ma perte est résolue,
Et le Destin la veut de puissance absolue ;
Ne t’oppose donc plus à cet arrêt des Cieux,
Et pense que le Sort, fait céder jusqu’aux Dieux.
Obéissons Emile, après cette injustice,
À la nécessité, qui veut que je périsse ;
Contentons Flavian, contentons nous ici ;
Il veut que je me perde, et je le veux aussi ;
Il veut que mon trépas, assure sa conquête ;
Il veut que je me perde, et j’y suis toute prête ;
Il veut m’abandonner, et je lui rends son coeur ;
Il paraît rigoureux, j’approuve sa rigueur ;
Il veut aimer ailleurs, et j’y consens, qu’il aime,
Il veut mon mal plus grand, et mon mal est extrême ;
Il veut que je le quitte, et je quitte ses pas ;