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Page:Gaboriau - Le Crime d’Orcival, 1867.djvu/21

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presque en face, un palefrenier était debout, occupé à nettoyer et à polir un mors de bride.

— Ce n’est guère la peine de sonner, messieurs, dit cet homme, il n’y a personne au château.

— Comment, personne ? demanda le maire surpris.

— J’entends, répondit le palefrenier, qu’il n’y a que les maîtres. Les gens sont tous partis hier soir, par le train de huit heures quarante, pour se rendre à Paris, assister à la noce de l’ancienne cuisinière, Mme Denis ; ils doivent revenir ce matin par le premier train. J’avais été invité, moi aussi…

— Grand Dieu ! interrompit M. Courtois, alors le comte et la comtesse sont restés seuls cette nuit ?

— Absolument seuls, monsieur le maire.

— C’est horrible !

Le père Plantat semblait s’impatienter de ce dialogue.

— Voyons, dit-il, nous ne pouvons nous éterniser à cette porte, les gendarmes n’arrivent pas, envoyons chercher le serrurier.

Déjà Philippe prenait son élan, lorsqu’au bout du chemin on entendit des chants et des rires. Cinq personnes, trois femmes et deux hommes parurent presque aussitôt.

— Ah ! voilà les gens du château, dit le palefrenier que cette visite matinale semblait intriguer singulièrement, ils doivent avoir une clé.

De leur côté, les domestiques, apercevant le groupe arrêté devant la grille, se turent et hâtèrent le pas. L’un d’eux, même, se mit à courir, devançant ainsi les autres ; c’était le valet de chambre du comte.

— Ces messieurs voudraient parler à monsieur le comte ? demanda-t-il, après avoir salué le maire et le juge de paix.

— Voici cinq fois que nous sonnons à tout rompre, dit le maire.

— C’est surprenant, fit le valet de chambre, monsieur