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Page:Gaboriau - Le Crime d’Orcival, 1867.djvu/36

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Cependant, monsieur le maire d’Orcival avait fait passer les nouveaux venus dans le salon où il s’était installé pour rédiger son procès-verbal.

— Quel malheur pour ma commune, que ce crime, disait-il au juge d’instruction, quelle honte ! Voilà Orcival perdu de réputation.

— C’est que je ne sais rien, ou autant dire, répondait M. Domini, le gendarme qui est venu me chercher était mal informé.

Alors, M. Courtois raconta longuement ce que lui avait appris son enquête sommaire, n’oubliant pas le plus inutile détail, insistant sur les précautions admirables qu’il avait cru devoir prendre. Il dit comment l’attitude des Bertaud avait tout d’abord éveillé ses soupçons, comment il les avait pris, à tout le moins en flagrant délit de mensonge, comment finalement il s’était décidé à les faire arrêter.

Il parlait debout, la tête rejetée en arrière, avec une emphase verbeuse, s’écoutant, triant les expressions. Et à chaque instant, les mots de : « Nous maire d’Orcival, » ou de : « Ensuite de quoi, » revenaient dans son discours. Enfin, il s’épanouissait dans l’exercice de ses fonctions, et le plaisir de parler le dédommageait un peu de ses angoisses.

— Et maintenant, conclut-il, je viens d’ordonner les plus exactes perquisitions qui, sans nul doute, nous ferons retrouver le cadavre du comte. Cinq hommes, par moi requis, et tous les gens de la maison battent le parc. Si leurs recherches ne sont pas couronnées de succès, j’ai sous la main des pêcheurs qui sonderont la rivière.

Le juge d’instruction se taisait, hochant simplement la tête de temps à autre en signe d’approbation. Il étudiait, il pesait les détails qui lui étaient communiqués, bâtissant déjà dans sa tête un plan d’instruction.

— Vous avez fort sagement agi, monsieur le maire, dit-il enfin. Le malheur est immense, mais je crois comme vous que nous sommes sur la trace des coupa-