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Page:Gaboriau - Le Crime d’Orcival, 1867.djvu/372

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— Je ne vous dissimulerai pas, reprit l’agent de la sûreté, que vous me demandez une chose bien difficile, et qui, de plus, est contre mon devoir. Mon devoir me commande de rechercher M. de Trémorel, de l’arrêter et de le livrer à la justice ; vous me priez, vous, de le soustraire à l’action de la loi.

— C’est au nom d’une infortunée que vous savez innocente.

— Une seule fois dans ma vie, monsieur, j’ai sacrifié mon devoir. Je n’ai pas su résister aux larmes d’une pauvre vieille mère qui embrassait mes genoux en me demandant grâce pour son fils. J’ai sauvé ce fils et il est devenu un honnête homme. Pour la seconde fois, je vais aujourd’hui outrepasser mon droit, risquer une tentative que ma conscience me reprochera peut-être : je me rends à vos instances.

— Oh ! monsieur, s’écria le père Plantat transporté, que de reconnaissance !

Mais l’agent de la sûreté restait grave, presque triste, il réfléchissait.

— Ne nous berçons pas d’un espoir qui peut être déçu, reprit-il. Je n’ai pas deux moyens d’arracher à la cour d’assises un criminel comme Trémorel, je n’en ai qu’un seul ; réussira-t-il ?

— Oui, oui, si vous le voulez.

M. Lecoq ne put s’empêcher de sourire de la foi du vieux juge de paix.

— Je suis certes un habile agent, répondit-il, mais je ne suis qu’un homme et je ne puis répondre des résolutions d’un autre homme. Tout dépend d’Hector. S’il s’agissait de tout autre coupable, je vous dirais : Je suis sûr. Avec lui, je vous l’avoue franchement, je doute. Nous devons surtout compter sur l’énergie de Mlle Courtois. Elle est énergique, m’avez-vous dit ?

— Elle est l’énergie même.

— Alors bon espoir. Mais éteindrons-nous vraiment cette affaire. Qu’arrivera-t-il quand on retrouvera la dé-