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géomètre où arpenteur de son état, il se permettait d’aspirer à la main d’une La Verberie !

Avec une véhémence particulière, elle insista sur ces considérations d’un ordre supérieur. Heureusement, ce chapitre épuisé, elle en vint au positif.

— Cependant, ajoutait-elle, il se peut que vous ne soyez pas éconduit. La situation de la comtesse est des plus embarrassées, elle doit à Dieu et à ses saints, la chère dame, les huissiers la visitent souvent, de sorte que… vous comprenez, si un jeune homme se présentait, animé d’intentions honnêtes et ayant du bien… eh ! eh ! je ne sais ce qui arriverait.

André Fauvel était jeune, les insinuations de la vieille dame lui semblèrent monstrueuses.

À la réflexion, cependant, lorsqu’il eut consulté, lorsqu’il se fut, surtout, donné la peine d’étudier l’esprit de la noblesse des environs, riche exclusivement de préjugés, il comprit que des considérations pécuniaires seraient seules assez fortes pour décider haute et puissante dame de La Verberie à lui accorder la main de sa fille.

Cette certitude dissipant ses hésitations, il ne songea plus qu’à se ménager un moyen de poser adroitement sa candidature.

Ce n’est pas que la chose lui parût aisée. S’en aller chercher femme son argent à la main répugnait fort à sa délicatesse et renversait toutes ses idées. Mais il ne connaissait dans le pays personne à qui se fier et son amour était assez grand pour le faire passer, les yeux fermés, sur toutes les répugnances.

L’occasion qu’il attendait de s’expliquer, sinon catégoriquement, au moins d’une façon claire et transparente, se présenta d’elle-même.

Comme il entrait, un soir, dans un hôtel de Beaucaire, pour dîner, il aperçut Mme de La Verberie qui allait se mettre à table. Tout en rougissant jusqu’aux oreilles, il lui demanda la permission de s’asseoir près d’elle, permission qui lui fut accordée avec un sourire des plus encourageants.