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Page:Gaboriau - Le Dossier n°113, 1867.djvu/309

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en s’éveillant, se dit : « Sera-ce pour aujourd’hui ? » n’a pas de plus épouvantables angoisses.

Clameran ne vint pas, il écrivit, ou plutôt, comme il était trop prudent pour préparer des armes contre lui, il fit écrire un billet, dont seule Mme Fauvel pouvait connaître le sens, et où, se disant malade, il s’excusait d’être forcé de lui donner rendez-vous pour le surlendemain, chez lui, à l’hôtel du Louvre.

Cette lettre fut presqu’un soulagement pour Mme Fauvel. Elle en était à tout préférer à ses anxiétés. Elle était résolue à consentir à tout.

Elle brûla donc la lettre en se disant : — « J’irai. »

Le surlendemain, en effet, à l’heure indiquée, elle mit la plus simple de ses robes noires, celui de ses chapeaux qui lui cachait le mieux le visage, glissa dans sa poche une voilette et sortit.

Ce n’est que fort loin de chez elle qu’elle osa prendre un fiacre qui la déposa devant l’hôtel du Louvre.

Là, de nouvelles inquiétudes l’assaillirent. Recevant beaucoup, allant souvent dans le monde, elle était connue d’une foule de gens, et elle frémissait à l’idée d’être rencontrée. Que penserait-on, si on l’apercevait à l’hôtel du Louvre, avec cette toilette, ce chapeau antique et cette voilette épaisse.

Certes, tous ceux qui la rencontreraient croiraient à une intrigue, à un rendez-vous, et ainsi elle serait perdue.

Dans son inexpérience, c’était, depuis son mariage, la première fois qu’elle avait besoin de se cacher, elle faisait tout pour passer inaperçue, c’est-à-dire tout pour être remarquée.

La chambre de M. le marquis Louis de Clameran était, lui dit le concierge, au troisième étage.

Elle s’élança, heureuse d’échapper à tous les regards qui lui semblaient s’attacher à elle ; mais, en dépit de minutieuses indications, elle se perdit dans l’immense hôtel et longtemps erra dans les interminables corridors.