mis en tête d’épouser Madeleine ? Ce jour-là, il a fallu la mettre dans le secret, et depuis elle soutient et conseille sa tante ; elle l’anime contre nous. Elle lui ferait tout avouer à M. Fauvel, ou tout conter au préfet de police, que je n’en serais pas bien surpris.
— Je l’aime…
— Eh ! tu me l’as déjà dit. Mais tout ceci n’est rien. Tu nous embarques dans une affaire sans l’avoir étudiée, sans la connaître. Il n’y a que les niais, mon oncle, qui après une faute se contentent de cette banale excuse « Si j’avais su ! » Il fallait t’informer. Que m’as-tu dit : « Ton père est mort. » Pas du tout, il vit, et nous avons agi de telle sorte que je ne puis me présenter chez lui. Il a un million qu’il m’aurait donné, et je n’en aurai pas un sou. Et il va chercher sa Valentine, et il la retrouvera, et alors, bonsoir…
D’un geste brusque, Louis interrompit Raoul.
— Assez ! commanda-t-il. Si j’ai tout compromis, j’ai un moyen sûr pour tout sauver.
— Toi ! un moyen ! Quel est-il ?
— Oh ! cela, fit Louis d’une voix sombre, c’est mon secret.
Louis et Raoul se turent pendant plus d’une minute.
Et ce silence entre ces deux hommes, en cette place, au milieu de la nuit, après la conversation qu’ils venaient d’avoir, fut si affreusement significatif que tous deux frissonnèrent.
Une abominable pensée leur était venue en même temps, et sans un mot, sans un geste, ils s’étaient compris.
Ce fut Louis qui le premier rompit ce silence pesant :
— Ainsi, commença-t-il, tu refuses les 150,000 francs que je te propose pour disparaître ? Réfléchis, il en est temps encore.
— C’est tout réfléchi. Je suis sûr maintenant que tu ne chercheras plus à me tromper. Entre l’aisance sûre et une grande fortune probable, à tous risques je choisis la fortune. Je réussirai ou je périrai avec toi.