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Page:Gaboriau - Le Dossier n°113, 1867.djvu/423

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— Quand il aura reconnu l’inanité de ses espérances et de ses efforts, pensait-elle, il attendra, il me l’a juré, jusqu’à demain, et moi, alors, demain…, demain…

Ce qu’elle ferait, le lendemain, elle l’ignorait et ne se le demandait même pas. Mais dans les situations extrêmes, le moindre délai rend l’espérance, comme si un court répit était le salut définitif.

Le condamné, au moment suprême, demande à genoux un sursis d’un jour, d’une heure, de quelques minutes. Raoul allait se tuer, elle priait Dieu de lui accorder une nuit, rien qu’une nuit, comme si en ce court espace de temps on eût pu compter sur des événements inattendus dénouant brusquement une situation impossible.

Ils étaient arrivés dans le bureau de Prosper, et Raoul avait placé la lampe sur une tablette assez élevée pour que, malgré l’abat-jour, elle éclairât toute la pièce.

Il avait alors recouvré sinon tout son sang-froid, au moins cette précision mécanique des mouvements, presque indépendante de la volonté, et que les hommes accoutumés au péril trouvent à leur service, alors qu’il est le plus pressant.

Rapidement, avec la dextérité de l’expérience, il plaça successivement les cinq boutons du coffre-fort sur les lettres composant le nom de G, y, p, s, y.

Ses traits, pendant cette courte opération, exprimaient une anxiété terrible. Il se demandait si l’affreuse énergie qu’il venait de déployer ne serait pas perdue, s’il parviendrait à ouvrir, s’il trouverait la somme annoncée. Prosper pouvait avoir changé le mot ; avait-il bien envoyé à la Banque dans la journée ?

C’est avec une douloureuse commisération que Mme Fauvel observait les visibles appréhensions de Raoul. On lisait dans ses yeux cet espoir fou des malheureux qui, souhaitant passionnément une chose, finissent par se persuader que la seule projection de leur volonté, suffit pour renverser les obstacles.

Ami intime de Prosper, étant venu le voir, le chercher cinquante fois, à la fermeture des bureaux, Raoul savait