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Page:Gaboriau - Le Dossier n°113, 1867.djvu/80

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Ayant, en grand secret, la veille, raconté à un de ses amis, clerc d’avoué, son aventure avec l’agent de la sûreté, ce clerc l’avait outrageusement plaisanté de sa poltronnerie. Il éprouvait d’affreux remords et avait passé la nuit à se reprocher d’avoir perdu Prosper.

Il eut au moins ce mérite de s’efforcer de réparer ce qu’il appelait sa trahison.

Il n’accusa pas précisément M. Fauvel, mais il déclara courageusement qu’il était l’ami du caissier, son obligé, et qu’il était sûr de son innocence comme de la sienne propre.

Malheureusement, outre qu’il n’avait nulles preuves à fournir à l’appui de ses dires, sa profession d’amitié passionnée enlevait beaucoup de valeur à ses déclarations.

Après Cavaillon, six ou huit employés de la maison Fauvel défilèrent successivement dans le cabinet du juge ; mais leurs dépositions furent presque toutes insignifiantes.

L’un d’eux, cependant, donna un détail que nota le juge. Il prétendit savoir que Prosper avait spéculé à la Bourse, par l’entremise de M. Raoul de Lagors, et gagné des sommes importantes.

Cinq heures sonnaient lorsque la liste des témoins cités pour ce jour fut épuisée. Mais la tâche de M. Patrigent n’était pas terminée encore. Il sonna son huissier, qui parut presque aussitôt, et lui dit :

— Allez, au plus vite, me chercher Fanferlot.

L’agent de la sûreté fut long à se rendre aux ordres du juge. Ayant rencontré dans la galerie un de ses collègues, il s’était cru obligé à une politesse, et l’huissier avait été obligé d’aller le relancer au petit estaminet du coin.

— Depuis quand vous faites-vous attendre ? dit sévèrement le juge lorsqu’il entra.

Fanferlot, qui s’était présenté en saluant jusqu’à terre, s’inclina, s’il est possible, plus profondément encore.

C’est qu’en dépit de son visage riant, mille inquiétu-