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Page:Gaboriau - Monsieur Lecoq, Dentu, 1869, tome 1.djvu/15

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sons-les dans la position où ils sont jusqu’à l’arrivée de la justice et voyons le troisième.

Le troisième respirait encore.

C’était un tout jeune homme, portant l’uniforme de l’infanterie de ligne. Il était en petite tenue, sans armes, et sa grande capote grise entr’ouverte laissait voir sa poitrine nue.

On le souleva avec mille précautions, car il geignait pitoyablement à chaque mouvement, et on le plaça sur son séant, le dos appuyé contre le mur.

Alors, il ouvrit les yeux, et d’une voix éteinte demanda à boire.

On lui présenta une tasse d’eau, il la vida avec délices, puis il respira longuement et parut reprendre quelques forces.

— Où es-tu blessé ? demanda Gévrol.

— À la tête, tenez, là, répondit-il en essayant de soulever un de ses bras, oh ! que je souffre !…

L’agent qui avait coupé la retraite du meurtrier s’était approché, et avec une dextérité que lui eût enviée un vieux chirurgien, il palpait la plaie béante que le jeune homme avait un peu au-dessus de la nuque.

— Ce n’est pas grand’chose, prononça-t-il.

Mais il n’y avait pas à se méprendre au mouvement de sa lèvre inférieure. Il était clair qu’il jugeait la blessure très-dangereuse, sinon mortelle.

— Ce ne sera même rien, affirma Gévrol, les coups à la tête, quand ils ne tuent pas roide, guérissent dans le mois.

Le blessé sourit tristement.

— J’ai mon compte, murmura-t-il.