Page:Gaboriau - Monsieur Lecoq, Dentu, 1869, tome 1.djvu/204

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Il avait déposé son masque d’insouciance gouailleuse, et affectait maintenant un ton bourru et mécontent.

Cependant il n’était pas à bout de peines, l’attaque sérieuse allait seulement commencer. M. Segmuller déposa sur son bureau un petit sac de toile :

— Reconnaissez-vous ceci ? demanda-t-il.

— Parfaitement !… c’est le paquet qui a été cacheté au greffe par le directeur.

Le juge ouvrit le sac et vida sur une feuille de papier la poussière qu’il contenait.

— Vous n’ignorez pas, prévenu, dit-il, que cette poussière provient de la boue qui recouvrait vos pieds jusqu’à la cheville. L’agent de police qui l’a recueillie s’est transporté au poste où vous avez passé la nuit, et il a constaté, entre cette poussière et celle qui recouvre le sol du violon, une parfaite conformité.

L’homme écoutait, bouche béante.

— Donc, continua le juge, c’est au poste certainement, et à dessein que vous vous êtes sali. Quel était votre projet ?

— Je voulais…

— Laissez-moi achever. Résolu, pour garder le secret de votre identité, à endosser l’individualité d’un homme des dernières classes de la société, d’un saltimbanque, vous avez réfléchi que les recherches de votre personne vous trahiraient. Vous avez prévu ce qu’on penserait quand on vous ferait déshabiller au greffe, et qu’on verrait sortir de bottes malpropres, grossières, éculées, telles que celles que vous portiez, des pieds soignés comme les vôtres… car ils sont soignés à l’égal de vos