Page:Gaboriau - Monsieur Lecoq, Dentu, 1869, tome 1.djvu/321

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— Oui, monsieur.

— Vous avez, prétendez-vous, des révélations à faire ?

— J’ai des choses importantes à vous dire.

— C’est bien ! ces messieurs vont se retirer…

M. Segmuller se retournait déjà vers Lecoq et le directeur, pour les prier de le laisser à ses fonctions, mais le prévenu, d’un mouvement de prostration, l’arrêta.

— Ce n’est pas la peine, prononça-t-il ; je me trouverai très-content, au contraire, de parler devant tout le monde.

— Parlez, alors.

Mai ne se fit pas répéter l’ordre. Il se mit en position, de trois quarts, la poitrine gonflée, la tête en arrière, comme toujours, depuis le début de l’instruction, quand il se disposait à faire parade de son éloquence.

— C’est pour vous dire, messieurs, commença-t-il, que je suis un très-honnête homme. Le métier n’y fait rien, n’est-ce pas ? On peut être chez un montreur de curiosités pour le boniment, et avoir du cœur et de l’honneur…

— Oh !… faites-nous grâce de vos réflexions.

— Vous le voulez, monsieur… je veux bien. Alors, en deux mots, voici un petit papier qu’on m’a jeté tout à l’heure. Il y a des numéros dessus qui doivent signifier quelque chose, mais j’ai eu beau chercher, je n’y ai vu que du feu.

Il tendit au juge, qui le prit, le billet chiffré par Lecoq, et ajouta :

— Il était roulé dans une boulette de mie de pain.

La violence de ce coup inattendu, inouï, abasourdit