Page:Gabriel Ferry - Costal l'Indien, 1875.djvu/309

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

son mari ; c’est une honte, dit-elle, qu’après le serment que vous avez fait tous deux, il reste encore une pierre de ce nid de vipères et un homme pour le défendre.

— Eh bien ! qu’y a-t-il ? demanda Arroyo d’un ton de mauvaise humeur.

— Je parle de l’hacienda del Valle, que vos hommes, une grande partie du moins, bloquent depuis trois jours sans résultat ; c’est-à-dire, non, car j’apprends à l’instant que trois de nos soldats ont été tués dans une sortie, et que leurs têtes sont exposées à la porte de l’hacienda par ce damné Catalan que Dieu confonde !

— Qui vous a dit cela ? s’écria Arroyo.

— El Gaspacho, qui n’attend que vos ordres pour entrer, et qui revient del Valle pour vous demander du renfort.

— De par tous les diables ! je trouve étrange que vous vous permettiez d’interroger avant moi les courriers qui me sont expédiés. »

En disant ces mots d’une voix tonnante, Arroyo s’était levé en saisissant le crâne de bœuf qui lui servait de siége, et il menaçait d’en briser celui de sa femme.

Peut-être, sous l’influence des paroles de Bocardo, allait-il se décider à porter seul le poids de l’exécration publique, s’il ne se fût souvenu à temps du scapulaire bénit à Rome.

Bocardo restait flegmatiquement assis.

« Maria Santissima ! s’écria la virago en se reculant effrayée devant la terrible colère de son mari, ne me protégerez-vous pas, seigneur Bocardo ?

— Hum ! répondit le bandit sans bouger, vous savez le proverbe, vénérable señora, entre l’arbre et l’écorce… que diable ! de petites querelles de ménage…

— Que cela n’arrive plus ! Il n’y a que deux chefs ici, dit Arroyo subitement radouci, et, ayant que je reçoive el Gaspacho, vous allez vous charger d’une commission.

— Laquelle ? demanda la femme, qui eut bien un in-