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Page:Gabriel Ferry - Les aventures d'un Français au pays de Caciques, 1881.djvu/273

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autre sifflement lui répondit derrière nous, et nous prouva que les deux rives étaient également gardées. Quelques secondes s’écoulèrent lentes comme des siècles. Des formes vagues se dessinèrent enfin sur les rochers au-dessus de nos têtes, des cris menaçants retentirent, et des lueurs vacillantes éclairèrent les flots. Le pilote n’attendit pas plus longtemps pour faire feu sur les bandits ; mais ceux-ci avaient sur nous l’avantage de la position et des armes plus terribles que les nôtres. Une détonation répondit d’abord au coup du pilote ; puis un bloc énorme de rocher, déplacé péniblement, fut lancé dans l’eau qui rejaillit sur la barque en gerbes d’écume. Le pilote poussa un cri d’angoisse. Pour nous, aveuglés, suffoqués par l’eau qui nous avait inondés, nous sentîmes le canot bondir comme sur la crête d’une vague, et, violemment arraché aux branchages qui le retenaient, dériver rapidement au fil de la rivière. Quand je revins de ma stupeur, le pilote n’était plus avec nous. Je l’appelai à plusieurs reprises ; Calros seul me répondit :

— C’en est fait de lui ! N’avez-vous pas entendu son dernier cri ? Il est au fond du fleuve. À notre tour maintenant.

Une prompte retraite était la seule chance de salut qui nous restât. Calros avait repris les avirons et ramait avec vigueur. Nul bruit ne se fai-