Page:Gabriel Ferry - Les aventures d'un Français au pays de Caciques, 1881.djvu/33

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du sereno privé de connaissance et peut-être mortellement blessé, car ce cavalier, il faut bien le dire, c’était moi mais j’aime mieux raconter ce qui s’ensuivit.

On connaît les habitudes bienveillantes de la populace des grandes villes à l’égard de ceux qui par malheur commettent d’aussi tristes maladresses. Pourtant on ne se rend peut-être pas un compte bien exact de l’attitude d’une pareille populace au Mexique, surtout vis-à-vis d’un étranger qui n’est pour elle qu’un ennemi naturel. Contenu malgré sa fougue, au milieu d’un flot pressé de léperos qui ne délibéraient que sur le genre de supplice à infliger à l’auteur désolé d’un pareil crime, mon cheval n’était pour moi d’aucune ressource, et je me surpris un instant à envier le sort du sereno insensible du moins aux atteintes de cette multitude, qui le foulait aux pieds sans prendre de lui nul souci. Fort heureusement le hasard m’envoya deux auxiliaires sur l’un desquels au moins j’étais loin de compter. Le premier fut un alcade qui, escorté de quatre soldats, se fit jour jusqu’à moi, et me dit qu’à ses yeux j’étais convaincu d’avoir causé la mort d’un citoyen mexicain. Je m’inclinai silencieusement. D’après les ordres du magistrat, on chargea le corps du sereno toujours immobile sur un espèce de brancard tenu en réserve dans la ca-