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Page:Gabriel Ferry - Les aventures d'un Français au pays de Caciques, 1881.djvu/61

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lueurs de la lampe qui brûlait pour les âmes du purgatoire, je vis les cinq hommes soulever un corps sanglant et le lancer dans le canal, dont la surface ne fut qu’un moment troublée. Une seconde après, les assassins avaient disparu, et cela si rapidement que je pus me demander si je ne venais pas de faire un mauvais rêve ; mais la réalité me serrait de trop près pour que je pusse caresser longtemps cette erreur. Un nouvel incident vint d’ailleurs me prouver que j’étais parfaitement éveillé. Un homme à cheval sortit de la maison où m’avait conduit un si fatal enchaînement de circonstances, et dans cet homme je reconnus Perico, dans ce cheval le noble animal que j’avais amené à si grand’peine de l’hacienda de la Noria.

– Holà, drôle m’écriai-je, ceci passe la permission ; tu me voles mon cheval !

– Seigneur cavalier, reprit Perico avec un sang-froid imperturbable, j’emporte une pièce de conviction qui pourrait être accablante pour votre seigneurie.

Tel fut l’adieu que me laissa le lépero, et le cheval, vigoureusement stimulé, partit au galop. Pour moi, sans prendre congé de personne, je m’élançai à la poursuite du vaurien. Il était trop tard, je n’entendis plus dans le lointain qu’un hennissement plaintif et le bruit du galop, que la distance