Page:Gagneur - Trois soeurs rivales.djvu/42

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son père, que ne ferais-je pas pour vous rendre heureux ! Eh bien ! oui, je vous la donne.

— Bon petit ange ! dit M. de Charassin, en l’embrassant étroitement.

Henriette sortit de chez son père le triomphe dans le cœur, et remonta dans sa chambre.



VI


M. de Charassin, resté seul, se replongea dans son fauteuil ; pour la première fois de sa vie, peut-être, il réfléchit pendant une demi-heure, et prit une résolution. Il ne fallait rien moins que ses quartiers de noblesse menacés pour le décider à prendre l’initiative, surtout en matière de mariage, un sujet d’ordinaire si délicat et si difficile à traiter.

Or, quand Henriette l’eut quitté : Ventre-saint-gris ! pensa-t-il, la petite est capable de faire par amour un coup de tête qui déshonorerait à jamais notre race ; mais nous y mettrons bon ordre. Elle a vingt-cinq ans, le sang espagnol coule dans ses veines, et l’amour bouillonne dans sa cervelle. Il faut donc à tout prix la marier avec M. de Vaudrey, afin de prévenir de grandes sottises… Mais ai-je bien le droit de léser mes autres enfants pour celle-ci ?

— Oui, certes ; puisqu’il s’agit de sauver l’honneur de la famille. D’ailleurs Renée et Gabrielle sont de race germanique ; elles seront longtemps, encore calmes et sages. Aujourd’hui donc, et tout à l’heure, je parlerai à mon pupille. S’il est vrai qu’il préfère Gabrielle à Henriette, une belle dot bien ronde de 200,000 livres en bonnes terres, lui fera peut-être changer de résolution ; je lui dirai du reste que Gabrielle est