Page:Gagneur - Trois soeurs rivales.djvu/7

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Pendant le silence qui succéda à cette petite déception, essayons d’esquisser le groupe plein de contrastes qu’offraient ces trois jolies créatures.

Mais d’abord un mot qui explique l’état d’hostilité que nous venons de remarquer entre Henriette et ses deux sœurs.

Henriette est l’enfant d’une première femme de M. de Charassin. Elle a été élevée par une tante qui lui inspira de bonne heure, pour Renée et Gabrielle, des sentiments de désaffection et de jalousie.

Lorsque Henriette, après la mort de sa belle-mère, revint dans la maison paternelle, elle avait vingt-et-un ans. D’un caractère despotique et violent, elle voulut imposer à ses jeunes sœurs la supériorité de son âge. Renée et Gabrielle sentirent alors la nécessité de s’unir contre leur ennemi commun. Il s’établit donc entre elles et Henriette un état de guerre permanent qui se révélait par de continuelles escarmouches.

Henriette, alors âgée de vingt-cinq ans, est brune. Sa figure, moins régulière que celle de ses sœurs, attire cependant l’attention par une expression tout à la fois fine et énergique. Elle ne charme pas au premier coup-d’œil comme Renée et Gabrielle ; mais on découvre en elle, sous une apparence de froideur, une organisation passionnée, et l’on devine, à ses mouvements vifs et saccadés, un tempérament fougueux, comprimé par l’éducation. Un penchant naturel à calculer sa conduite, penchant transformé en ruse par suite d’une fausse direction, se révèle dans ses lèvres minces et dans l’acuité de son œil noir et pénétrant. Son menton, fortement accen-