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UTILITÉ DES PARTIES DU CORPS HUMAIN, I, viii.

été créés. Les ongles sont encore très-utiles pour une foule d’opérations ; par exemple, s’il faut, ou racler, ou gratter, ou écorcher, ou déchirer, car nous avons besoin des ongles dans presque toutes les circonstances de la vie, pour tous les arts, et surtout pour ceux qui réclament un emploi industrieux de la main. Comme organe de préhension pour les objets petits ou durs, la main avait particulièrement besoin des ongles.


Chapitre viii. — Des opinions de Platon et d’Aristote sur les ongles. — De la méthode qu’on doit employer pour la recherche de l’utilité des parties. Qu’il faut avant tout bien connaître les fonctions des organes. — Motifs qui ont engagé Galien à écrire son traité.


Comment se fait-il que Platon, imitateur d’Hippocrate, s’il en fut jamais, et qui lui a emprunté ses plus grands dogmes, ait traité des ongles avec si peu de soin ? Comment Aristote, si habile cependant à expliquer beaucoup de choses, et en particulier l’artifice de la nature, s’est-il montré si négligent en parlant de l’utilité des ongles ? Le premier nous représente les Dieux qui ont créé l’homme comme des artisans inhabiles faisant pousser les ongles aux doigts de l’homme, parce qu’ils s’exerçaient à faire des ongles qui devaient un jour servir aux autres animaux[1]. Quant à Aris-

  1. Le passage duquel Galien se moque bien à tort se trouve dans le Timée, p. 76. En voici la traduction ; j’ai cru devoir modifier celle de M. H. Martin : « Cet entrelacement aux doigts des nerfs avec la peau et les os, ce mélange de trois substances, forme en se desséchant un tout qui est une peau dure fabriquée d’après ces causes accessoires, mais formée par l’Intelligence qui est la cause suprême, en vue des choses futures, car ceux qui nous ont organisés savaient bien qu’après les hommes viendraient les femmes et les autres animaux, et ils ont prévu que beaucoup d’animaux auraient besoin des ongles dans beaucoup de circonstances. C’est pour cette raison que chez les hommes aussitôt qu’ils ont été formés, les Dieux ont créé le type (ὑπετυπώσαντο) des ongles. » C’est là un passage des plus importants pour l’histoire de la philosophie des sciences naturelles, on y trouve en germe une partie de la doctrine de G. Saint-Hilaire, sur la persistance du type dans la série animale. L’expression σημείου χάριν qui se lit dans Aristote (Part. anim., III, vii) rappelle aussi cette théorie. — M. H. Martin n’a peut-être pas entièrement saisi la signification du texte de Platon, et C. Hoffmann (Variæ lectiones, VI, xix, p. 305) s’est complètement écarté de la véritable interprétation. — Dans son Commentaire sur le Timée (voy. les Fragments que j’ai publiés, pour la première fois, en grec et en français ; Paris, 1848, 8o, p. 7), Galien compare la peau qui entoure les ongles à celle qui forme les gencives, il pense