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EXHORTATION A L'ÉTUDE DES ARTS.

est même qui représentent ce Dieu sous cette simple forme[1]. Considérez la troupe de ses adorateurs[2], toujours gais comme le dieu dont ils forment le cortège ; jamais ils ne se plaignent de lui comme le font les serviteurs de la Fortune. Jamais ils n’en sont abandonnés et ils ne s’en séparent jamais[3] ; accompagnant toujours le Dieu, ils jouissent incessamment des bienfaits de sa providence.


Chapitre iv. — Tableau du cortége de la Fortune. — Les favoris de cette divinité jouissent d’une prospérité éphémère, suivie de terribles revers. Ceux qui courent après elle, et qu’elle dédaigne, sont un ramassis de mauvais sujets et de débauchés.


Examinez au contraire les suivants de la Fortune, vous les verrez tous oisifs et inhabiles dans les arts[4] ; portés par l’espérance, ils courent après la déesse rapide, ceux-ci de près, ceux-là

  1. Il y avait beaucoup de ces représentations de Mercure ; on les appelait Hermès (Ἑρμᾶς) ; la tête et le phallus, ou la tête seule, étaient sculptés sur un bloc de pierre quadrangulaire ; c’est de là que vient l’épithète τετράγλωχις (quadrangulaire) donnée à Mercure.
  2. Galien se sert ici du mot θιασῶται, terme primitivement consacré pour désigner les personnes faisant partie d’une thiase, ou réunion, dans laquelle on célébrait les fêtes d’un Dieu, et particulièrement de Bacchus. Plus tard, θίασος a signifié toute espèce de réunion, même profane.
  3. Le texte porte οὐδὲ χωριζομένους ; Willet veut lire χειμαζομένους (agités par les tourments de l’inquiétude). Il est certain que ce sens irait très bien et que οὐδὲ χειμ. répondrait à cet autre membre de phrase : καὶ διὰ παντὸς ἀπολαύοντας τῆς προνοίας αὐτοῦ. On pourrait d’ailleurs appuyer cette correction, comme le fait Willet, sur un passage de Plutarque (De animi tranq., p. 466 c), mais le texte vulgaire étant suffisant, il n’y a aucune nécessité de le changer.
  4. Comme on demandait à Socrate (Xénophon, Memorab., III, ix, 14) quel avantage lui paraissait le plus grand pour un homme, il répondit : Bien faire une chose utile (εὐπραξία). Et comme on lui demandait encore s’il estimait que le bonheur dû à la fortune était un avantage : « Je pense, dit-il, que l’action et la fortune sont deux choses tout à fait opposées. En effet, rencontrer sans les rechercher quelques-unes des choses qui conviennent, c’est la bonne fortune (εὐτυχία) ; mais bien faire, en apprenant et en exerçant, c’est pour moi le succès, et ceux qui le recherchent me paraissent bien agir. » Socrate, ajoute Xénophon, regardait comme les plus excellents et les meilleurs serviteurs des Dieux, les hommes qui remplissent bien leur profession. Admirable sentence, trop souvent perdue de vue !