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DE LA TÊTE, DE L’ENCÉPHALE, DES SENS.



Chapitre iii. — Le chapitre précédent était une attaque indirecte contre Aristote ; dans celui-ci, la réfutation est directe. En disant que l’encéphale était chargé de rafraîchir le cœur, Aristote oublie le témoignage des sens ; il est en contradiction avec lui-même, car il est d’avis que la respiration est chargée de procurer cette réfrigération, et en soutenant cette opinion vraie, il tombe dans une nouvelle contradiction, car il est d’avis que l’air est naturellement chaud. — Galien démontre qu’il est matériellement impossible que le cœur soit rafraîchi par l’encéphale ; il le serait plutôt par le calcanéum. — Contrairement à l’opinion d’Aristote, il soutient que tous les sens sont en rapport avec l’encéphale. S’il en était autrement, cet organe aurait été créé sans but, ou bien il devrait être réduit à l’état d’éponge.


On a peu de raison de s’étonner que ce système ait été adopté par certains écrivains, mais quand on le voit soutenu par Aristote, qui ne serait au comble de l’étonnement ? Voici un philosophe qui n’a pas négligé l’étude des phénomènes fournis par l’anatomie, qui ne méconnaît pas leur utilité, qui dit lui-même (Top. I, ix, extr.) que parmi les problèmes, les uns réclament une solution, les autres un éclaircissement, d’autres le témoignage des sens ; et bientôt on le surprend n’ajoutant plus foi aux phénomènes démontrés par les sens et oubliant ses propres arguments. En effet, le toucher indique toujours que l’encéphale est plus chaud que l’air ambiant. Eh bien, Aristote prétend qu’il a été créé dans le but de refroidir le cœur ; mais il oublie que lui-même a déclaré que cette réfrigération était l’œuvre de la respiration.

Il faut lui donner des éloges pour avoir démontré, conformément au dire d’Hippocrate (Des vents, § 4, t. VI, p. 96 ; De la nat. de l’enfant, § 12 et 15, t. VII, p. 486 et 492 ; De l’aliment, in medio ; Epid. VI, vi, 1, t. V, p. 323), et avec la vérité l’utilité de la respiration. Mais il a eu tort d’oublier qu’il avait dit ailleurs que l’air est naturellement chaud (De gener. et corrupt., II, iii)[1]. Ou bien s’il a eu raison d’oublier des assertions erronées, il a tort

  1. « Huic (sc. Galeno) pulchre respondet Accorambonus : Distinguendum esse, an loquamur de aere, in se considerato, an potius, ut permiscentur illi vapores ? Aer in se consideratus est calidus et humidus |θερμόν τι ὄν καὶ ὑγρόν| teste quoque Hippocrate initio libri De carnibus [§ 2, t. VIII, p. 584]. Non est igitur ψευδῶς εἰρημένον, mendax assertio, aut mendacium, sed ipsissima veritas. Nec pugnat ut ipse putat (Galenus) : Aer est calidus, et tamen refrigerat cor ! » Voilà par quels solides arguments Hoffmann (l. l., p. 164) défendait au xviie siècle Aristote contre Galien !