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UTILITÉ DES PARTIES DU CORPS HUMAIN, X, xi-xii.

tinuel, que sur les susdits conduits ont été insérés les corps charnus qui empêchent l’évacuation des superfluités des yeux par les angles, et qui les poussent dans les conduits qui leur sont destinés.

La plus grande preuve de cette assertion, ce sont les erreurs fréquentes des médecins qui s’intitulent oculistes. Il en est qui, dissolvant avec des collyres mordants, ce qu’on nomme ptérygions, grandes aspérités (granulations)[1], fics et cals des paupières, ont aussi dissout à leur insu cette caroncule membraneuse du grand angle. D’autres, dans leurs opérations chirurgicales sur cette partie, en ont retranché plus qu’il ne convenait, et de cette manière les superfluités (c’est-à-dire les larmes), coulent le long des joues. Ils appellent cette affection écoulement (ῥοιάς, larmoiement, épiphora). Qu’est-il besoin de faire ressortir l’absurdité d’une pareille conduite ?

Mais la nature a ménagé soigneusement ces dispositions ; elle a de plus encore établi aux paupières mêmes de très-petits trous (points lacrymaux), un peu en dehors du grand angle. Ils s’étendent jusqu’au nez et versent ou reçoivent tour à tour une humeur ténue. Leur utilité n’est pas médiocre en déversant cette humeur quand elle est abondante, et en la reprenant quand elle fait défaut, pour maintenir la mesure naturelle convenable à la facile exécution des mouvements des paupières. En effet, la sécheresse excessive les rend, en augmentant leur dureté, difficiles à fléchir et à mouvoir, et l’abondance de l’humeur les rend débiles et molles. La consistance moyenne seule est la meilleure pour toutes les actions naturelles.

Pour la facilité des mouvements, il existe aussi deux glandes à chaque œil, l’une à la partie inférieure, l’autre à la partie supérieure (glandes lacrymales inférieure et supérieure) ; ces glandes versant l’humeur par des conduits visibles (conduits lacrymaux), comme les glandes situées à la racine de la langue versent la salive dans la bouche. La nature n’a pas disposé non plus pour un autre but la graisse qui entoure les yeux. Sa dureté en est une preuve. En effet étant, vu cette dureté, difficile à dissoudre, elle protège perpétuellement les yeux par son onctuosité.

  1. Voy. Sichel, Cachets d’oculistes romains ; Paris, 1845, p. 9.