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DE LA FACE.

ront les pupilles, ceux de tous les organes qui ont le moins besoin d’être offusqués. Est-ce donc que notre Créateur a enjoint à ces poils seuls de conserver toujours leur longueur égale, et que ceux-ci, respectant l’injonction ou redoutant le Dieu qui avait commandé, ou convaincus eux-mêmes qu’il valait mieux agir ainsi, conservent leur dimension comme ils en ont reçu l’ordre ?

Est-ce que cette façon dont Moïse résolvait les questions naturelles est meilleure que celle dont se sert Épicure ? À mon avis, il est préférable de ne prendre ni l’une ni l’autre explication ; et tout en conservant, comme Moïse, le principe de la génération par un Créateur dans toutes les choses engendrées, il faut ajouter à ce principe celui qui dérive de la matière (voy. XV, i)[1]. Si donc notre Créateur a fait des poils qui étaient dans la nécessité de conserver toujours la même longueur, c’est que cela était préférable. Quand il eut décidé qu’il fallait créer des poils de cette sorte, il étendit en conséquence sous les uns un corps dur comme un cartilage ; sous les autres une peau épaisse, unie au cartilage par les sourcils[2]. En effet, il ne suffisait pas seulement de vouloir que les

  1. Galien, faisant ici allusion au premier chapitre de la Genèse où éclate l’omnipotence du Créateur, refuse à Dieu la toute-puissance absolue, celle par exemple de faire un homme avec une pierre, il veut que Dieu soit astreint aux lois de la matière ; toutefois il reconnaît que la suprême providence de Moïse vaut mieux que le hasard désordonné d’Épicure. La vraie différence qui existe entre Galien et Moïse, c’est que pour Galien les lois de la matière sont antérieures et supérieures à Dieu, tandis que pour Moïse Dieu crée en même temps la matière et ses lois, que, par conséquent, il la gouverne à son gré ; mais il ne s’ensuit pas positivement que le Dieu de Moïse ne tienne pas compte des conditions mêmes de la matière dans les créations ; s’il prend par exemple du limon pour faire un homme, ce limon reçoit à l’instant dans ses mains les qualités de la matière animale ; il ne fera pas plus pousser un oiseau sur un arbre, ou une plante sur un animal que des poils sur un os. Seulement, dans l’opinion de Moïse, Dieu peut transformer la matière à son gré et la mettre dans des conditions propres à chaque créature.
  2. On a, dans tout ce chapitre, un exemple frappant de l’incohérence, de la stérilité et de l’insuffisance des explications physiologiques de Galien, Ainsi, il croit que les superfluités qui s’échappent de la tête à travers le crâne sont destinées à nourrir ces cheveux ; il admet en même temps que les hommes ont plus de ces superfluités que les femmes, et que c’est pour cela qu’ils ont des poils à la fuis sur la tête, aux joues et au menton ; mais il ne s’aperçoit pas d’une part que tous les poils réunis de la face et de la tête chez l’homme ne valent pas