Page:Galmot - Un mort vivait parmi nous, 1922.djvu/262

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


LVI



C’ÉTAIT un matin miraculeusement rose, une aurore sur la montagne. Au loin, les arbres étages vers le bas étaient poudrés de brume et ressemblaient à des vergers en fleurs. Toutes les feuilles étaient rouges, toutes les branches étaient blanches.

Tout au fond, le soleil levant agitait à la brise des rubans bariolés et diaprés, changeant à chaque instant comme un décor sous des feux de projecteur… des rubans lilas et mauves, violets et pourpres, rose-chair et capucine, orange et blonds, gris-cendrés et fauves et tendres.

La terrasse, où ils avaient passé la nuit, était encore grise des ombres étirées. L’air, entre les branches, avait une teinte cuivrée, brunâtre et rousse.

Sur le monde épanoui du matin, il y avait ce qui tue : la solitude qui pénètre le sang de l’homme, son âme et sa chair… la désolation qui s’étend sur des centaines de milles plus loin que l’horizon… il y avait la désolation affolante du silence sur la plaine verte et diaprée.

Lorsque la lumière du soleil eut éclairé l’abri, l’Indien vit que Pierre Deschamps et Marcel