Page:Galmot - Un mort vivait parmi nous, 1922.djvu/34

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les feux des chantiers je ne vois que l’image des hommes, je n’entends qu’une large voix humaine déployée sur la plaine.

Je sais bien que les hommes, seuls, ont créé cette force. Ce soir, Delorme apportera la production d’or. Assis devant la grande table, ayant à ses côtés Ganne, Loubet, Marcellin et Colbert, il pèsera les pépites et la poudre d’or pressée dans les peaux de chamois. Puis, tous signeront le procès-verbal pour la Compagnie. Leurs yeux auront des regards aigus de convoitise, les plis de leurs visages frémiront devant l’or étalé. Il n’y a pas solution de continuité entre l’âme obscure de ces hommes et le métal brillant, il n’y a qu’une gradation de lumière. Toute leur vie n’a qu’un seul objectif : l’or. C’est pour lui qu’ils vivent ici, pour lui qu’ils souffrent cette vie d’enfer dans la fournaise du marécage. Il n’y a pas de place dans leur esprit pour d’autre passion que la passion de l’or.

Un nuage glisse sur mon front ; un court vertige m’oblige à m’appuyer au parapet.

Sur la terrasse où j’étais seul, un homme est venu dont les pas sont comme une trace sur l’eau. Il est là, près de moi, et je sens sur mes épaules un fardeau qui m’accable.