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LE DOCTEUR OMÉGA

du parc par une barrière qui donnait sur les champs.

C’était folie de quitter si tôt ma demeure, puisque celui que je voulais voir ne passait habituellement qu’à neuf heures au pied de la terrasse. Mais une impatience fébrile me torturait… Je n’aurais pu rester chez moi. Il me fallait du mouvement pour tromper mon attente.

À peine eus-je dépassé les prés qui bordent mon cottage que je fus, comme malgré moi, poussé justement du côté où je ne voulais pas aller.

J’avais beau m’arrêter, louvoyer, prendre des sentiers inconnus, une force invincible me ramenait toujours vers un chemin montant qui conduisait à la plaine habitée par le docteur. Enfin, j’arrivai à un endroit où la côte s’arrêtait brusquement.

Devant moi s’étendait la vallée et, sous le soleil levant, les routes lointaines, que la perspective rendait plus escarpées, prenaient des tons d’or en fusion.

Comme mes yeux s’étaient portés sur la plaine, je vis une masse compacte de débris fumants qui se composaient de grosses poutres, de planches et de ferrures bizarrement entremêlées.

Une sorte de réverbération verdâtre produite sans doute par la décomposition d’acides et de substances chimiques flottait au-dessus de ces ruines.

Il me sembla même apercevoir, au milieu des décombres, des corps carbonisés qui levaient vers le ciel leurs bras tordus et noircis.

M’étant approché, je reconnus que ce que je prenais pour des corps, c’était tout simplement de petits réservoirs cylindriques auxquels adhéraient encore des supports de bois brûlé.

Au milieu de cet enchevêtrement, un globe terrestre demeuré intact, mais noirci par la fumée, émergeait, telle