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LE BACILLE

J’ai vécu longtemps dans les hôpitaux, j’y ai vu toutes les difformités, toutes les monstruosités dont la nature se plaît parfois à accabler notre pauvre humanité, mais jamais je n’ai rencontré de monstre plus repoussant que celui dont j’ai entrepris de conter la navrante histoire.

Rien n’était impressionnant comme cette face qui semblait celle d’un cadavre en décomposition et qui était cependant éclairée par deux yeux jaunes où se lisait la douleur de vivre encore et l’exaspération de ne plus compter parmi les vivants… La plume d’un Edgar Poe pourrait seule rendre une telle vision d’épouvante… Cela donnait le frisson et fascinait tout à la fois.

Et pourtant, cet homme avait été beau !… Ses longs cheveux bouclés aux reflets d’or fauve, ses yeux veloutés et profonds avaient fait tourner plus d’une tête de femme, alors qu’il conférenciait à la Sorbonne sur d’arides sujets de bactériologie.

Car on avait pris l’habitude d’aller à son cours comme on va à un five o’clock, et sur les gradins du vaste amphithéâtre, le contraste était frappant de ces mondaines aux toilettes chatoyantes, à côté