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retiré des affaires

je m’assis à côté de Manzana à qui je fis servir une ample portion de « minced lamb » et une pinte de stout.

Tout en mangeant, il parlait et ne cessait de m’accabler de reproches… Il en revenait toujours à son expulsion du Good Star et cherchait à rejeter sur moi toutes les responsabilités.

— Comme je ne parle pas anglais, dit-il, vous en avez profité pour raconter sur mon compte quelque vilaine histoire au capitaine et c’est pour cela qu’il m’a débarqué, Enfin, n’en parlons plus. Je vous ai retrouvé, c’est le principal… causons un peu de choses sérieuses… Et notre diamant ?

— Je vous ai déjà dit que je ne l’avais plus.

Les yeux de Manzana eurent un éclat sinistre.

— Vous mentez, dit-il.

— Je vous jure que je dis la vérité.

— Racontez ça à d’autres, mais pas à moi…

— Je ne l’ai plus, répétai-je avec force.

— Alors, vous l’avez vendu ?

— Non… on me l’a pris…

— On vous l’a pris… on vous l’a pris… et qui donc ?

J’eus un geste vague.

— Et vous croyez, fit Manzana d’une voix grinçante, que vous allez vous en tirer comme ça ?… Vous croyez qu’il suffit de dire « on me l’a pris » pour que tout soit fini entre nous… Ah ! vous ne me connaissez pas, Edgar Pipe… Si demain, vous ne me montrez pas le diamant, je vais à l’ambassade de France et je dis que c’est vous qui avez volé le Régent.

— Et moi, répondis-je d’un ton calme, je vais à Scotland Yard avec la dame que vous connaissez…

Manzana s’efforça de rire, mais je vis bien qu’il était quand même troublé…

Il avala une large lampée de stout et dit, après s’être essuyé les lèvres avec sa manche :

— Vous ferez ce que vous voudrez, mais croyez bien que moi aussi je saurai agir… Tant pis pour vous !… Je