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mémoires d’un cambrioleur

— Avec plaisir… où cela ?

— Chez vous, si vous n’y voyez pas d’inconvénient.

— Mais comment donc ! Permettez cependant que je monte prévenir ma femme… elle est couchée… je crois, et vous comprenez…

— Oui… oui, c’est tout naturel.

Je montai quatre à quatre les escaliers, en proie à une agitation que le lecteur devinera sans peine. Je me voyais perdu…

Les réticences de Dickson, ses sous-entendus et aussi cette entrevue qu’il voulait absolument avoir avec moi, tout cela n’était pas naturel. Le drôle me soupçonnait et il espérait, en venant chez moi, trouver la preuve ou tout au moins l’indice qu’il cherchait. À cette minute, j’étais décidé à tout, même à sauter du troisième étage dans la rue.

— Qu’avez-vous donc, Edgar ? demanda Édith en me voyant si troublé.

— Rien… rien… ah ! j’ai eu bien tort de courir au secours de cette vieille folle de miss Mellis… un détective l’a interrogée — vous savez ce gentleman que nous avons rencontré au poste — et il va monter ici pour causer un peu avec moi… Tirez les rideaux du lit, Édith… il ne serait pas convenable que cet homme vous vît au lit.

Et tout en parlant, j’enfilais à la hâte mes bottines, ces précieuses bottines dont l’un des talons contenait une fortune. J’étais, on le sait, en pyjama mais j’avais conservé en dessous ma chemise de jour et mon gilet dans les poches duquel j’entendais sonner les pièces d’or de miss Mellis. Quant au portefeuille contenant les bank-notes, j’avais eu soin, avant de descendre, de le glisser sous le lit. Je le ramassai vivement sans attirer l’attention d’Édith et l’introduisis entre mon gilet de flanelle et ma peau. J’étais prêt aussi à endosser mon pardessus, quand Allan Dickson entra sans frapper, et cette incorrection me prouva qu’il ne me considérait déjà plus comme un simple témoin,