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XIX

« alea jacta est »

Le soir même, le Sea-Gull entrait dans le port de Santa-Cruz, et s’amarrait à quai, en face d’un dock. Après l’allumage des feux de position, Maître Ross nous réunit tous et nous adressa le petit speech suivant :

— Vous savez, sans doute, que nous allons demeurer ici une huitaine… peut-être plus… Nous allons donc profiter de cette relâche pour briquer le pont, et faire les cuivres. Il faudra aussi laver les voiles et, quand la toilette de l’extérieur sera faite, nous nous occuperons de l’entrepont et de la cale. Je ne veux point cependant vous traiter en esclaves. Je suis un brave homme, moi, et tous mes matelots sont mes enfants… Je vais établir un roulement… Un jour, ce sera la bordée de tribord qui sera libre, un autre jour, celle de bâbord… Seulement, je vous préviens, celui qui rentrera en état d’ivresse sera bouclé jusqu’à l’appareillage… Quant aux cuisiniers (et il désigna Zanzibar et moi), ils seront exempts de service un jour sur deux, à tour de rôle… Ceux qui voudront toucher une avance sur leur décompte n’auront qu’à venir me trouver… Je sais ce que c’est que s’amuser, j’ai été jeune, moi aussi… Rompez, mes enfants.

Je n’avais jamais vu le capitaine Ross si aimable… Je crois qu’il avait peur que quelques-uns de ses marins ne le quittassent pour s’engager sur un « bananier ». Les engagements contractés à bord du Sea-Gull n’avaient