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La lune disparut bientôt pour faire place à l’aube du jour ; il était alors près de cinq heures.

L’Hermite, exténué de fatigue, s’était assis sur l’affût d’un obusier. Tantôt, il examinait avec inquiétude la mâture de la frégate, pliant comme un roseau sous l’effort des voiles, actuellement toutes établies ; parfois il jetait un regard sur le vaisseau anglais qu’il apercevait à chaque tangage par les fenêtres de la dunette, puis il retombait ensuite dans ses réflexions ; enfin, vaincu par la nature, il appuya sa tête sur sa main et finit par s’endormir.

Midi sonnait, et l’ennemi ne se trouvait plus qu’à une portée de canon sur notre arrière. L’équipage, respectant le sommeil de son capitaine, avait observé, en opérant les préparatifs du combat, un profond silence, lorsque l’Hermite, comme si un pressentiment l’eût averti que l’heure solennelle du combat allait sonner, ouvrit tout à coup les yeux, et d’un bond se mit sur pied.


XIII

Son premier regard fut pour le vaisseau ennemi : en le voyant si près de la frégate, un sourire joyeux s’épanouit sur son visage : peut-être voulait-il inspirer de la confiance à l’équipage, peut-être aussi, et cette supposition est tout à fait en rapport avec son caractère, éprouvait-il une joie sincère en pensant qu’il lui allait être enfin permis tout en obéissant à ses instructions, de couvrir notre fuite prolongée d’un peu de gloire. Il fit appeler ses officiers sur la dunette et leur communiqua son intention de passer avec eux une revue de l’équipage. Ce projet fut aussitôt mis à exécution.