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— Tu me complimentes, toi ! Alors tu n’y es pas du tout !

— Un marché ? Si je te dis ce dont il retourne, l’avoueras-tu ?

— Ça va, me répondit-il après avoir réfléchi un instant, foi de Breton, je te l’avouerai. À propos, t’as pas besoin de crier ça tout haut…

— Eh bien ! repris-je à demi-voix en me penchant vers lui, le capitaine t’a fait promettre que si nous tombons au pouvoir de l’Anglais, tu mettras le feu aux poudres et que tu feras sauter la frégate…

— Mon vieux, tu n’y es pas du tout ! N, i, ni, c’est fini ! attention… le spectacle va commencer.

III

En ce moment, M. Fouré, officier des manœuvres, interrompit notre conversation en donnant un ordre à Kernau, et je restai fort intrigué de savoir quelle avait pu être l’importante communication faite par mon cousin Beaulieu-Leloup à mon matelot.

M. Fouré, que je revis bien des années après capitaine de port à Rochefort, était un singulier personnage ; pour lui, son existence ne comptait qu’à partir de la dernière guerre de l’Inde. Tout ce qui ne se rapportait pas à cette époque, dont Suffren, sous les ordres de qui il avait débuté, fut le héros, n’existait pas pour lui. Il éprouvait un singulier mépris pour la marine actuelle, prétendant qu’elle avait dégénéré du tout au tout, et que les combats s’étaient métamorphosés en jeux d’enfants. Je suis persuadé