Page:Garneray - Voyages (Lebègue 1851).djvu/60

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la position critique de mon matelot, j’allais prendre mon élan et essayer de traverser la haie de sacripants qui me barrait la porte de sortie, lorsqu’une heureuse inspiration me sauva.

— Au secours, mes amis ! m’écriai-je d’un air effrayé, le feu est au couvent, je vais chercher les pompes…

À cette nouvelle, que personne ne put mettre en doute, car tout le monde ignorait ce qui se passait, ce fut une confusion et un pêle-mêle général et complet. J’en profitai pour m’éloigner au plus vite.

Je courais comme un fou dans la rue, portant partout mes regards effarés et anxieux pour voir si je n’apercevais pas quelques camarades, lorsque je me trouvai face à face avec un enseigne de la Brûle-Gueule, que je manquai de renverser en le heurtant.


— Ah ! monsieur Olivier, m’écriai-je en le reconnaissant, et sans songer à m’excuser de ma brutalité, tant j’étais ému par la pensée du danger auquel était exposé mon matelot. Kernau est dans le couvent des Franciscains, où les moines le retiennent de force et veulent le faire assassiner par la populace… Sauvez-le !…

L’enseigne Olivier, jeune officier de tête et de cœur, comprit à mon émotion que je disais vrai, que je n’exagérais pas ; aussi, sans perdre à m’interroger un temps précieux :

— Allez vite prévenir le maître d’équipage Fiéret, que je viens d’apercevoir, en passant, dans ce café-ci, me dit-il en me désignant du doigt une espèce de vinoteria voisine ; puis, plus loin, au bout de la rue, toujours de ce même côté, vous trouverez une vingtaine de nos hommes attablés dans un cabaret… Moi, je me rends au couvent des Franciscains…