Page:Garneray - Voyages (Lebègue 1851).djvu/88

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réfléchi et préoccupé, se mit à arpenter d’un pas saccadé et nerveux la longueur du navire, tantôt s’arrêtant pour diriger sa longue-vue vers la baie, tantôt pour interroger les vigies.

Le vent, déjà bien affaibli, au lieu de fraîchir, comme nous l’espérions tous, tombait au contraire de plus en plus ; il devenait presque impossible d’arriver à l’ancrage, et la journée s’écoulait.

Le fond manquant pour mouiller au large, il ne nous restait plus que la ressource de passer la nuit sous voiles. Seulement, la frégate courait alors le risque d’être drossée hors de la baie par le courant, pendant le calme qui règne quotidiennement entre la brise de terre et celle du large.

Je connaissais alors assez un navire et j’étais également assez avancé dans mes études pour me rendre parfaitement compte de notre position ; aussi ne fus-je nullement étonné en voyant le capitaine l’Hermite, pour mettre sa responsabilité à couvert, assembler son conseil, afin de décider, séance tenante, si l’on continuait la route vers le fond de la rade, après avoir déguisé toutefois autant que possible la frégate en navire de commerce, ou si l’on prendrait le large pendant la nuit.

Dans ce dernier cas, il était bien entendu que l’on reviendrait le lendemain de très bonne heure, afin de pouvoir mouiller au plus tard dans l’après-midi.

Ces deux avis soulevèrent une discussion assez vive, car le temps pressait ; mais, en définitive, les partisans du premier parti, celui de tâcher de pénétrer tout de suite au fond de la baie, l’emportèrent. Restait à savoir si la brise devenue de plus en plus faible, qui enflait à peine nos voiles, permettait de le mettre à exécution.

Cependant, à la joie de tout l’équipage, qui, alléché