mon père baleine ou mes enfants baleineaux. File l’écoute du grand foc ! va pour la dernière fois !
Six mois après, Bon-Œil n’avait plus besoin que d’une baleine pour compléter son chargement. Il amena sa pirogue sur une bonne grosse baleine qui jouait avec quatre baleineaux.
— Plus que ça de luxe ! cria-t-il, sauvez la vie aux cafres.
Et les pauvres petits cafres venaient, trois heures après, à tour de rôle, flairer les bordages de la cale où leur maman était descendue coupée en morceaux.
— Enfants, tout est dit, s’écria Bon-Œil, au vent la barre, timonnier ! Brasse carré et arrive pour Sag-Harbourg ! Si le grand monsieur noir me repince à espeller des baleines, je veux bien que les moutons rôtis courent les rues la fourchette sur le dos et la moutarde sous la queue !
Ah ! mes enfants, il n’avait pas plutôt dit ça que voilà le monsieur noir qui se présente et lui dit :
— Bonjour, Bon-Œil.
— Tiens, c’est vous ! répondit Bon-Œil peu rassuré, mais essayant de rire. Pas besoin de vous déranger, je n’ai pas fait souffler le sang à un membre de ma famille ?
— Parfaitement, tu viens de tuer ta femme qui, morte depuis huit jours, était baleine depuis ce matin. Tu n’as donc pas reconnu tes cafres ?
Et le grand monsieur noir hala le capitaine par-dessus bord comme un paquet d’étoupe et fit avec lui un plongeon que je ne voudrais pas faire !…
Telle est l’histoire véridique du grand baleinier du Sag-Harbourg. Lui et sa famille habitent ces parages où nous boulinguons. Il a fait connaissance avec toutes les baleines de la localité et vous devez penser qu’il leur a appris la manière d’échapper aux harpons. Aussi vous n’en piquerez pas une seule. Sur ce, bonsoir. J’ai dit.