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antenolle.

reux de tous, d’autant mieux que, le navire étant en panne, je n’avais pas le mal de mer.

Il était temps. Une flottille d’embarcations se dirigeait vers nous. C’étaient des pirogues, pleines de gens armés faisant force de rames pour rallier la Blanchette.

Aussitôt le son aigu du sifflet se fait entendre. On hale sur l’embossure, et notre navire obéissant à la force de ce cordage se place en travers de l’ennemi et lui montre sa batterie. Le pavillon anglais monte à la corne et on l’assure d’un coup de canon.

Les Arabes pour répondre à cette politesse lèvent leurs rames et arborent leur pavillon. Puis ils tournent autour de nous et, ne reconnaissant plus la Blanchette, vont s’éloigner, quand Tombaleau qui était chargé du service des caronades, s’ennuyant de voir « ces chiens » rôder autour du navire, leur envoie une décharge à mitraille.

Stupéfaits un instant par cette trombe de fer qui tue et blesse beaucoup d’entre eux, les Arabes se regardent, mais reviennent en poussant des cris de fureur. Tombaleau a eu le temps de recharger ses deux caronades. Cette fois une trombe de flammes et de fer tombe sur les draws, les coule, tue leurs matelots et nous délivre en cinq minutes de nos ennemis.

Au même instant la brise s’élève, et cette fois, pour tout de bon, nous nous éloignons de Zanzibar, non sans avoir déshabillé la Blanchette, les nègres et nous-mêmes du travestissement qui nous avait si peu servi. Je dois dire que c’est ce qui me fit le plus de peine. Je m’étais habitué à mon costume.

Du reste, le mal de mer me reprit plus que jamais. Il fallut, pour m’en guérir provisoirement, ce qui nous arriva, vingt jours après, un vendredi, 13 mars !…

Depuis quelque temps, nos nègres ne mangeaient plus de bon appétit. Ils négligeaient leurs travaux, ne se livraient plus à la