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la tour de cordouan.

refusèrent tout service, et il fut obligé de s’asseoir pour ne pas tomber.

Pendant ce temps, Clinfoc déchirait les vêtements de Paul et mettait sa blessure à nu. Deux gardiens arrivaient avec une petite pharmacie de poche et, tant bien que mal, on disposa un premier appareil afin d’étancher le sang. Puis, Clinfoc, prenant dans ses bras le jeune homme, toujours évanoui, le transporta à la tour. Quand Paul revint à lui, il était déjà déshabillé et couché dans un bon lit. Il souffrait horriblement, mais il essaya de sourire et demanda son oncle.

Le capitaine était à la même place, le fusil en main, attendant des nouvelles pour savoir s’il ne devait pas se punir lui-même avec l’arme qui avait tué son neveu. On lui envoya un gardien qui l’amena, toujours pâle, muet, insensible, dans la chambre où Paul reposait. Clinfoc était déjà parti pour Royan. Il allait chercher un médecin, mais comme la mer était très-forte, il ne pouvait pas être de retour avant le lendemain. Heureusement que le plus vieux des gardiens se connaissait en blessures. Dès que Paul fut revenu à lui, il leva le premier appareil et constata que la blessure, quoique grave, n’était pas dangereuse : que pas un grain de plomb n’était resté dans la plaie, que l’os n’était pas attaqué et affirma que, s’il ne survenait aucune complication, on n’aurait pas besoin de lui couper la jambe. Un docteur n’eût pas mieux parlé. Le gardien lava la blessure, rapprocha les chairs et fit le premier pansement.

— Là, dit-il, quand ce fut fait, le docteur peut arriver quand il voudra, nous avons le temps d’attendre. Dormez, jeune homme, le repos vous fera du bien.

Paul dormait déjà. Son oncle passa la nuit sur une chaise sans verser une larme, sans proférer une parole. Au jour Clinfoc arriva avec le docteur. Celui-ci fut satisfait du pansement, et, après avoir examiné attentivement la plaie, affirma qu’il répondait de