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Page:Gaskell - Autour du sofa.djvu/54

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AUTOUR DU SOFA.

pour l’entendre ; le magistrat tournait le dos à celui-ci, mais il entendit marcher ; il ne douta pas que ce ne fût l’ecclésiastique, et ses manières devinrent de plus en plus maussades. Toutefois, il était devant lady Ludlow et n’osait pas lui parler comme il l’eût fait à M. Gray. Milady n’en vit pas moins sur sa figure qu’il persistait dans son opinion ; elle s’en exaspéra, et, prenant la chose à cœur :

« Vous ne refuserez pas, lui dit-elle, d’accepter ma caution ; mettez ce pauvre homme en liberté ; je vous offre de m’engager pour lui, et je vous assure qu’il paraîtra devant le tribunal au moment des assises.

— La caution ne peut être acceptée lorsqu’il s’agit d’un vol, madame, répondit M. Lathom.

— C’est possible dans les circonstances ordinaires, répliqua milady ; mais il s’agit d’un cas tout à fait exceptionnel ; Job est envoyé en prison tout bonnement pour vous souhaiter la bienvenue, et malgré toutes les preuves qui établissent son innocence. Je ne doute pas qu’il ne soit acquitté aux assises ; mais en attendant il sera plus de six semaines en prison, et sa femme et ses enfants mourront de faim. C’est pour cela que moi, lady Ludlow, je vous offre ma caution pour lui, et je m’engage à le faire comparaître lorsque le moment sera venu.

— La loi s’y oppose, madame…

— Bah ! bah ! qu’est-ce qui fait les lois, monsieur Lathom ? Mes pareils dans la chambre des lords, et les vôtres dans celle des communes. Puisque nous faisons la loi nous pouvons en forcer la lettre, quand nous avons pour nous le bon droit et notre conscience, et que nous sommes sur nos terres, au milieu de gens qui nous appartiennent.

— Le lord-lieutenant me retirerait ma commission, s’il apprenait pareille chose.