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Page:Gaskell - Autour du sofa.djvu/79

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LADY LUDLOW.

est pas adressée, alors même qu’elle serait ouverte devant vous.

— C’était pour m’apprendre, Votre Seigneurie ; ça me paraissait tout aussi bon qu’un livre. »

Milady fut bouleversée et réfléchit un instant au moyen de lui faire comprendre ce que l’honneur exigeait en pareille circonstance.

« Vous n’écouteriez pas, dit-elle, j’en suis sûre, un entretien dont vous ne feriez point partie. »

Cette question ne fut pas comprise ; milady la répéta en d’autres termes ; un éclair d’intelligence traversa les yeux du pauvre gars, et il répondit, toutefois en hésitant :

« Pardon, Votre Seigneurie, j’écoute toujours ce que disent les gens, surtout quand je suppose qu’ils ont des secrets ; mais je ne croyais pas avoir tort. »

Ma pauvre lady soupira ; elle n’était pas préparée à faire un cours de morale ; l’honneur était pour elle comme une seconde nature, et jamais elle n’avait recherché sur quels principes on a établi ses lois. Ne trouvant rien à répondre, en face d’une pareille ignorance des premiers éléments de la loyauté, elle se contenta de dire au petit Gregsone qu’elle désirait voir M. Horner aussitôt qu’il serait de retour ; et d’une voix abattue elle congédia l’enfant, qui s’éloigna, trop heureux d’échapper à la douceur imposante dont elle l’avait accablé.

« Que faire ? » reprit lady Ludlow après un long silence.

J’aurais été fort embarrassée de lui répondre.

« J’ai employé le mot propre, continua-t-elle, quand j’ai appelé la lecture et l’écriture des instruments dangereux ; si l’on donne ces armes tranchantes à nos basses classes, nous verrons bientôt en Angleterre toutes les horreurs de la révolution française. Dans ma jeunesse, personne n’avait entendu parler des droits de l’homme ; on n’en connaissait que les devoirs. Et voilà M. Gray,