Page:Gaskell - Cousine Phillis.djvu/256

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— Je ne louerai jamais cette maison, dit-elle se levant soudain et presque avec l’accent du défi.

— Permettez !… je ne comprends plus… ou plutôt vous ne m’avez pas compris. Le revenu de ce domaine, chère Ellenor, est tout ce qui vous reste pour vivre.

— Soit… je ne dis pas non, mais je ne puis sortir d’ici. Vous m’entendez, monsieur Ness, je n’en puis sortir.

— On ne vous pressera pas, chère enfant. Je sais toutes les peines qui sont venues fondre à la fois sur vous. Maudit soit le jour où Corbet est entré chez moi !… (ceci fut dit par manière de parenthèse et tout à fait in petto, mais Ellenor n’en frémit pas moins de la tête aux pieds…) mais encore faut-il que cette maison passe en d’autres mains… Il le faut, parce que vous ne pouvez manquer du strict nécessaire… La chose, d’ailleurs, est à peu près conclue.

— Conclue ?… sans mon aveu ?… mais je suis ici chez moi… Cette maison m’a été assignée, je le sais fort bien, et…

— Vous vous trompez, mon enfant. Elle est détenue, pour votre compte, par sir Frank Holster et M. Johnson. Les produits et revenus ne peuvent profiter qu’à vous, ajouta-t-il doucement, car il lui croyait évidemment la cervelle un peu troublée, mais veuillez vous souvenir que vous n’êtes point majeure, ce qui nous laisse, M. Johnson et moi, investis de tout pouvoir… »

Ellenor se rassit, complètement découragée :

« J’ai besoin de rester seule, dit-elle enfin. Vous êtes la bonté même, mais vous ne savez pas tout… Au surplus, je suis à bout de forces, » ajouta-t-elle d’une voix atténuée.

M. Ness, l’ayant paternellement baisée au front, la quitta sans rien ajouter, et alla du même pas trouver miss Monro, qu’il trouva fort mal disposée. Elle se plai-