Page:Gaskell - Cousine Phillis.djvu/324

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malheureux condamné des espérances peut-être illusoires… Attendons à demain, et que miss Wilkins, d’ici là, consente à prendre quelque repos. »

Miss Monro revint avec ce refus poli dont elle craignait l’effet sur la pauvre Ellenor, qu’elle avait laissée aux prises avec une extrême agitation. Elle la retrouva comme engourdie par un sommeil involontaire. À peine ouvrit-elle les yeux pour écouter ce que lui disait son amie, et tout au plus parut-elle la comprendre. Le voyage rapide et contrarié, les soucis incessants, les brusques péripéties avaient enfin triomphé d’elle. Aussi, le lendemain matin, quand arriva l’ordonnance qui autorisait la mise en liberté du pauvre Dixon, quand le sheriff se fit un devoir d’en aviser miss Wilkins en lui expédiant la permission nécessaire pour qu’elle annonçât elle-même la bonne nouvelle à son heureux protégé,… tout ceci demeura ignoré d’Ellenor, qui, pendant plusieurs jours, plusieurs semaines encore, se trouva incapable de toute action, voire de toute pensée.

Ce fut au commencement de juin, par une tiède soirée d’été, que miss Monro entendit une voix faible l’appeler auprès du lit sur lequel sa chère malade s’était quelque temps débattue entre la vie et la mort : « Où est Dixon ? lui demanda Ellenor.

— À Bromham ; chez le chanoine. »

Bromham était la paroisse du docteur Livingstone.

« Pourquoi cela ?

— On a pensé que le changement d’air et d’entourage lui serait bon.

— Il va bien ?

— De mieux en mieux… Vous le verrez aussitôt qu’il vous saura guérie. »

Ellenor, rassurée, n’en demanda pas davantage et se rendormit aussitôt de lassitude et de faiblesse.