Page:Gaskell - Les Amoureux de Sylvia.djvu/52

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— Précisément, dit Philip… Et d’où venez-vous, Hester ? » demanda-t-il quand ils furent à portée de voix.

Hester rougit quelque peu et répondit ensuite avec son calme ordinaire :

« Je suis allée tenir compagnie à Betsy Darley…, Nous la savions forcée de garder le lit… Il devait lui être pénible de rester seule pendant que le reste de la famille assistait à l’enterrement. »

Elle parut ensuite vouloir passer son chemin, mais Sylvia, qui portait le plus vif intérêt à la parenté du défunt, s’empressa de lui adresser coup sur coup plusieurs questions. Comme elle avait, pour la retenir un moment, posé sa main sur le bras d’Hester, celle-ci recula d’un pas, rougissant plus fort que jamais, et répondit ensuite avec une obligeante gravité à tout ce qui lui était demandé.

Pas plus que la généralité de ses contemporains, Sylvia ne possédait ce don d’analyse qui semble être le caractère distinctif de notre époque. Aussi ne songea-t-elle pas à comparer la conduite d’Hester avec la sienne. Cette comparaison, si elle l’eût faite, n’aurait pas tourné à son avantage. Tandis que la jeune quakeresse faisait œuvre d’abnégation et de charité, Sylvia n’avait été attirée à l’église que par une vaine curiosité, une arrière-pensée de coquetterie, un besoin malsain d’émotions fortes. Mais sans se rendre compte de tout ceci, — et sans qu’aucun retour d’amour-propre lui fît perdre le plaisir d’admirer ce qu’une autre avait fait de bien :

« Qu’elle est bonne ! s’écria Sylvia quand Hester les eut quittés, et après un silence de quelques minutes.

— Vous avez raison, reprit Philip avec chaleur, et nul ne le sait mieux que votre serviteur, puisque nous habitons sous le même toit.