Page:Gaskell - Les Amoureux de Sylvia.djvu/71

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avait annoncés ? Était-il ou n’était-il pas le fiancé de Molly Corney ? Lorsqu’une série de raisonnements lui avait fait adopter peu à peu telle ou telle conclusion, elle changeait tout à coup d’avis et envisageait les choses sous un autre aspect. Elle finit par se dire que ses incertitudes devaient nécessairement rester les mêmes, tant qu’elle n’aurait pas vu Molly ; et à partir de ce moment, par un grand effort sur elle-même, elle résolut de ne plus penser à Kinraid, mais seulement aux merveilles qu’il lui avait racontées. Leur souvenir serait sa consolation pendant ces soirées qu’elle passait à filer en silence auprès du foyer, et plus tard, l’été venu, quand elle emporterait son tricot dans ce creux de rocher dont elle avait fait son asile favori depuis que ses parents étaient établis à Haytersbank. Elle allait souvent y respirer la fraîcheur des brises marines, et trouvait une sorte de volupté oisive à contempler de là les vaisseaux lointains, à suivre du regard leur marche rapide sur les flots paisibles, sans s’inquiéter d’ailleurs ni de leurs destins passés, ni des longs voyages qu’ils avaient encore à faire.

X

UNE ÉDUCATION.

Philip Hepburn, quand il revint, trouva Sylvia moins disposée que jamais à transcrire le beau nom « d’Abednégo. » En revanche, quand elle voulut lui raconter les exploits de Kinraid, il ne lui prêta qu’une attention assez dédaigneuse, et la jeune écolière, mécontente de son maître, en serait venue à quelque révolte ouverte s’il n’avait prononcé fort à propos le mot de « géographie. »